Journées suisses des
Médecines du personnel
des Institutions de soins

La main au travail
Lausanne - CHUV
18-19 novembre 2004

Journées scientifiques
de la Société Suisse
de Médecine du Travail

Syndrome du tunnels carpien, épicondylite et travail : point de vue du rhumatologue

D. Van Linthoudt, Service de rhumatologie, médecine physique et réhabilitation
Hôpital, 2300 La Chaux-de-Fonds

La douleur et les troubles sensitifs des membres supérieurs sont rapportés dans la population en âge de travailler avec une prévalence variant de 3 à 44 %. La fréquence du syndrome du tunnel carpien (STC) serait proche de 1%; celle des épicondylalgies (EP) atteindrait globalement 2%. Chez les travailleurs manuels, ces affections seraient jusqu'à 10 fois plus fréquentes. Elles ont été décrites chez les ouvriers utilisant des engins vibrants, effectuant des efforts prolongés de préhension des mains ou répétés de flexion-extension des poignets pour le STC et de rotation des poignets pour les EP. Le STC a également été rapporté avec une fréquence augmentée chez les personnes travaillant en chambre froide notamment à la découpe de viande congelée. Ces affections par surcharge des membres supérieurs peuvent être associées et une bilatéralité de l'atteinte n'est pas rare, surtout pour le STC.

Le paradoxe apparent entre une augmentation du nombre de patients alors que la charge au travail a tendance à devenir plus légère peut s'expliquer de différentes façons. De nouvelles professions sont incriminées. C'est le cas des hygiénistes dentaires, des ouvriers effectuant de l'assemblage électronique, des personnes utilisant un ordinateur de manière prolongée y compris les secrétaires, infirmières et radiologues. Dans ces activités non lourdes, un décalage entre la commande motrice, l'exécution du mouvement et le contrôle visuel serait responsable d'un dysfonctionnement du système nerveux central. D'autres facteurs, surtout psycho-sociaux sont également incriminés. La monotonie du travail, le stress, la stimulation exagérée à la productivité, le manque de soutien des collègues et de dialogue avec la hiérarchie seraient impliqués dans ces pathologies. Ces facteurs prolongeraient également l'évolution.

Accorder trop d'importance aux facteurs professionnels n'est pas conseillé. Si une optimalisation de l'ergonomie au travail est recommandée, insister sur les risques encourus par le travailleur peut focaliser celui-ci sur une origine professionnelle à ses symptômes, ce qui constitue déjà une tendance naturelle alors que le travail n'est pas toujours en cause. Même chez le travailleur de force, une origine endocrinienne, rhumatismale, tumorale ou anatomique ou des dépôts microcrostallins ou amyloïdes doivent être envisagés.

En pratique, le praticien doit d'abord confirmer le diagnostic par l'anamnèse (localisation des douleurs, allure mécanique et parfois inflammatoire des symptômes) et l'examen clinique (Tinel et Phalen pour le STC; douleurs à la pression et aux mouvements contrariés pour les EP). Le diagnostic différentiel est large et comprend d'une manière non exhaustive les douleurs irradiées, névralgies suspendues, une affection osseuse ou musculaire. La radiographie standard objective parfois une érosion sous les insertions tendineuses (spondylarthropathie) ou des dépôts microcristallins, une arthrose ou une lésion osseuse sous-jacente. L'échographie peut objectiver la neuropathie compressive et l'enthésite. L'imagerie par résonance magnétique et l'EMG peuvent confirmer le diagnostic en cas de doute. Ce dernier examen est indispensable si une intervention chirurgicale est envisagée pour une EP afin d'exclure une neuropathie compressive du nerf ulnaire ou de la branche profonde du nerf radial sous l'arcade de Frohse. Les traitements font appel aux AINS et antalgiques par voie générale, infiltrations locales, techniques physiques et ergothérapeutiques. La chirurgie est parfois nécessaire mais son indication doit tenir compte de l'évaluation globale du patient.